jeudi 25 juin 2009

Régis pour sa grand-mère

Pour Mamie


Quand je suis né, ma mamie était une grand-mère toute neuve et peut-être inexpérimentée. Mais pour moi c’était comme si elle avait toujours été grand-mère, avec des règles de grand-mère et un savoir-faire de grand-mère. Je pensais que cela durerait toujours et je ne me suis plus posé la question. Mamie était là et faisait régner l’ordre sur ses terres.


Le territoire sur lequel elle gouvernait en maître absolue était Montreuil-Bellay où Maële et moi passions les mois de Juillet. J’ai longtemps imaginé que ce pouvoir de grand-mère reposait sur une sorte de noblesse. La révolution n’avait pas atteint un lieu aussi reculé, dominé par un château qu’il était même possible de visiter « gratuitement » en disant qu’on venait de la part de Mme Godchot. Il était donc tout à fait normal de se plier à la tradition, que ce soit pour l’entretien du jardin (grassement récompensé comme tous autres « marchandages » qui indignaient Colette et nous plaisaient donc d’autant plus), la chasse aux escargots après la pluie ou encore la pêche à la ligne dans les eaux du Thouet. Parfois Maële tentait une brève rébellion qui se réglait rapidement par une course poursuite dans les allées du jardin.


A Charenton, je me souviens des mardi soirs, où j’ai découvert les Tarzans et les Westerns avec les John respectivement Weissmuller et Wayne. Les mercredi matins au lit, Mamie recomptait mes vertèbres et mes côtes pour savoir si un crocodile ou un indien ne m’en avait pas volées pendant la nuit. Elle vérifiait aussi si je m’étais bien lavé le dos car sinon, une plaque noir finirait par apparaître, comme dans les histoires qu’elle me racontait - et si cela n’était pas arrivé cela arriverait peut être.


Car Mamie était championne pour raconter des histoires, des histoires de grand-mère pour faire manger, pour faire dormir, pour faire rire ou simplement pour raconter des histoires. Des histoires que je pensais sans fin. Alors ma mamie, je voulais me la garder pour toujours parce qu’elle avait toujours été là. Parce que malgré son âge, moi je ne la voyais pas vieillir. Bien sûr, elle marchait moins bien, respirait plus difficilement, répétait les mêmes anecdotes, mais elle restait la même avec ses piques et ses remerciement déguisés. Et je l’aimais.


Alors, je ne voulais pas qu’elle parte, même si elle nous disait qu’elle en avait assez vu et que 98 ans, c’était beaucoup trop long.

Elle est finalement partie. J’ai perdu un peu de moi, un peu de ma famille. Mamie espérait au contraire retrouver la sienne et c’est tout ce que je lui souhaite.

Aucun commentaire: