lundi 5 mai 2008

... les parents crapahutent dans l'Atlas

Dimanche 27 Avril, 5h du mat'
Branle-bas de combat et départ pour Orly Sud, où un avion pour Marrakech nous attend. Enfin, façon de parler car en fait, c'est plutôt nous qui attendons l'avion, qui a deux heures de retard. Au point qu'on a même craint de croiser mes parents, Eponine et Sidonie car leur vol pour Djerba, prévu deux heures après le nôtre, était, lui, annoncé à l'heure et dans la même salle d'embarquement!

Marrakech
Ici, l'été a déjà commencé : 34° à l'ombre et de la brume (chaleur? pollution? je n'ose deviner). L'architecture de la ville est assez belle, composée de maisons et petits immeubles traditionnels en pierre ocre avec moucharabiés et enluminures et agrémentée de jardins abondamment arrosés. L'avenue Mohammed VI, baptisée ainsi en l'honneur de l'actuel Roi du Maroc (fils d'Hassan II), est bordée de rosiers fleuries sur ses 7 Km de longueur. Les rues sont soit parallèles, soit perpendiculaires, comme aux Etats-Unis et les programmes immobiliers, encourageant les étrangers à faire construire au Maroc, poussent comme des champignons, tout comme les panneaux publicitaires vantant les marques françaises de prêt-à-porter et cosmétique (Promod, Sephora, Etam..).

L'hôtel Oudaya, notre résidence pour deux nuits (celles des premier et dernier jours), est situé dans le quartier résidentiel de Gueliz, au Nord de la Medina et abrite une belle piscine assez froide dans un patio à arcades.
Notre premier aperçu de la célèbre place Jamaa El Fna est étonnant : une immense esplanade quasiment vide, écrasée sous le soleil de midi, ouvrant sur les souks et précédée d'une allée gorgée de calèches à touristes, déserte elle aussi.
Ce n'est qu'à la nuit tombée que nous découvrirons la place sous son jour véritable : noire de monde, grouillante de vie, recouverte de stands vendant des oranges pressées ou des escargots en barquette et peuplée de charmeurs de serpents, danseurs, musiciens, conteurs et tatoueuses.

Mais avant cela, nous aurons eu le temps :
- de goûter à la pastilla marocaine et déguster plusieurs divins jus de fraise-orange à la glace pilée au Ryad Mabrouka
- de se perdre maintes fois dans les ruelles et les cul-de-sac de la Médina aux abords du Palais Impérial
- de visiter le magnifique Palais El Bahia aux murs et plafonds sculptés et aux petites cours intérieurs baignées de fontaines et décorées de mosaïques et de jardinets vert tendre

- d'acheter du "rouge-à-lèvres berbère" (du coquelicot dans une terre cuite, qui rougit la peau lorsqu'on la frotte), un petit pain d'ambre pour le corps et de la poudre à sniffer contre le rhume (on la met dans un tissu noir qu'on frotte contre la paume avant de la respirer : picotements de gorge et débouchage de nez garanti!)
- de se faire masser les cervicales à l'huile d'Argan (Régis)
- de faire des kilomètres sous un soleil de plomb, dans toutes les directions, et de prendre quantité de photographies.
Le soir venu, nous retrouvons les autres membres du groupe de randonnée devant la Koutoubia (la Grande Mosquée) pour un dîner traditionnel couscous / tajine sur une terrasse donnant sur la place Jmaa El Fna.
A 23h, lorsque, épuisés par notre journée, nous cherchons enfin un taxi pour rentrer à l'hôtel, nous sommes accueillis par une joyeuse cacophonie de klaxons, ronronnements de mobilettes, bruits de charrettes, brouhahas de voix humaines et cris d'enfants.

Marrakech, décidément, est la ville du mouvement perpétuel.

La vallée de l'Ourika
Cette vallée, située à une heure de voiture environ de Marrakech, est le lieu de villégiature favori des citadins fuyant la chaleur étouffante de Marrakech et pas assez riches pour aller vers l'Atlantique chercher la fraîcheur et le dépaysement. Verte, gorgée d'eau et semée de belles petites villas ocres à flanc de collines, la vallée a malheureusement subi en 1995 une grave inondation, qui a fait de nombreuses victimes et dont les dégâts sont encore visibles aujourd'hui : maisons effondrées, gravats, ponts coupés etc. En ce jour de semaine, c'est un Eden bucolique et on se prend à rêver de siroter une petite bière sous une de ses tonnelles ombragées.
Le trek démarre par la traversée d'un pont suspendu (Indiana Jones n'est pas loin) et par une longue montée (700m de dénivelé), longeant un village perché sur la montagne et surplombant de magnifiques cultures en terrasse au subtil dégradé de couleurs.

L'aventure peut commencer!

Trekking dans l'Atlas
Arrivés au premier col, on parcourt les crêtes, profitant de superbes panoramas sur les plateaux du Yagour et accompagnés par les bêlements des chèvres et chevreaux, dont les bergeries ne sont pas loin. On pic-nique près d'un ruisseau chantant et après une heure de marche, on parvient au bivouac du soir, à 2100m d'altitude dans un décor de haute montagne vert et ocre, infiniment dépaysant, immenses pâturages fleuris dominés par les sommets enneigés du massif du Toubkal.

La nuit tombe vite et le froid avec et chacun sort sa polaire. Régis et moi nous félicitons mutuellement d'avoir pensé aux bonnets!

Pendant quatre autres journées, nous randonnons dans les montagnes de l'Atlas, accomplissant une boucle de 70km environ, marchant quotidiennement entre 5h et 6h. Mais chaque jour est différent du précédent et le décor évolue vite, passant sans transition des pâturages d'altitude aux canyons désertiques, en passant par les villages aux jardins cultivés, les oueds et les prairies.
Le troisième jour, on quitte les bergeries et les cultures en terrasse d'un vert profond, on gravit un col et on redescend dans la rocaille et la poussière ocre au fond de la vallée suivante, près d'une rivière.

Le quatrième jour, on longe l'oued et on traverse plusieurs villages berbères.
Le cinquième jour, on chausse les sandales et on poursuit la randonnée les pieds dans l'eau glacée, dans un paysage qui évoque les Alpes du Sud et les Gorges du Verdon. Au début, le froid est une souffrance mais au bout d'une demi-heure, on s'habitue et on ne sent plus ses jambes. De même, pour la première traversée de rivière dans le courant, avec de l'eau jusqu'aux cuisses, on s'aide mutuellement.
Mais au fur et à mesure des traversées, chacun se débrouille et trouve sa technique. Lorsqu'on marche dans les cultures marécageuses et les herbes hautes, la fièvre de l'aventure nous reprend!

Le sixième jour, on quitte l'univers aquatique pour amorcer une remontée de 900m jusqu'à un col à 3000m d'altitude. L'ascension est épuisante sous le soleil brûlant mais l'odeur du thym et du romarin sur le chemin évoque la Provence et le panorama sur les deux vallées de part et d'autre est magnifique : cimes enneigées d'un côté, montagnes rouges et villages de l'autre, et à l'horizon, les plaines infinies de Marrakech...
Scènes de la vie quotidienne
Notre groupe "Terres d'aventure" est composé de 14 personnes, entre 25 et 60 ans, toutes sympathiques (c'est rare), majoritairement de région parisienne et de métiers divers : enseignants, cadres chez EDF et SCNF, ingénieurs, chirurgien... A cela s'ajoute notre guide, Mohammed, jeune homme discret, souriant et connaissant bien la région ; Ibrahim, le cuisinier génial qui nous prépare des crêpes pour le petit-déjeuner, des frites au déjeuner et des beignets au goûter, et qui mitonne avec talent le tajine et le couscous au milieu de nulle part ; et les muletiers et leurs mules, qui portent nos bagages, les tentes, les matelas et la nourriture pour une semaine en autonomie.
Chaque soir, nous devons monter nos tentes igloo et les démonter au lever (sauf lorsque certains ont la bonne idée de les démater avec les occupants encore dedans) et presque chaque jour, nous avons la possibilité de nous laver dans la rivière (froide!) ou à un point d'eau. Lorsque nous bivouaquons à proximité d'un village, les muletiers dressent une tente "WC" pour éviter que nous soyions surpris en pleine action par les gens du cru. Mais certains préfèrent tout de même "chasser le yéti" (expression adoptée d'emblée par le groupe) en pleine nature.
Au fur et à mesure du trek, les tignasses deviennent du crin, les peaux se burinent, les moustiques font des ravages et certains commencent à accuser la fatigue mais cela n'empêche pas les discussions politiques hilarantes et les chants et danses avec nos compagnons de voyage marocains.

Rencontres Berbères
Lorsque nous croisons des Berbères dans la montagne, nous les saluons d'un "Salaam Alaikoum" approximatif et ils répondent toujours gentiment à notre salut. A la traversée des villages, la plupart des enfants accourent, curieux de voir la tête des touristes, ou se précipitent pour nous regarder de leur balcon. Ils réclament souvent des bonbons ou des stylos mais en cas de refus, n'insistent pas et acceptent généralement de bonne grâce d'être photographiés, contrairement aux adultes qui déclinent presque toujours la proposition. Parfois même, ce sont les enfants qui réclament des photos afin de se voir sur l'écran numérique.


Si les hommes sont habillés à l'occidentale, avec des maillots de foot et des savates ou des baskets, les femmes et les petites filles sont encore en costume traditionnel, grandes tuniques à fleurs et foulards. Quant aux petits berbères, habillés de bric et de broc, ils sont très beaux, rieurs au regard perçant.
Un jour, Raymond, la cinquantaine, se baigne dans la rivière pour faire sa toilette et en ressort torse nu, avec sa serviette autour des reins. Deux femmes berbères qui passent par là, perchées sur leur mule, pouffent avec espièglerie en l'apercevant. Une autre fois, Dona et Camille, les plus jeunes du groupe, se lavent dans l'oued en maillot de bain sous le regard attentif d'une bande de petits garçons, assis sagement sur un rocher pour ne pas en perdre une miette.

Ca sent la fin
Le septième jour, nous n'avons plus qu'une heure de marche avant de parvenir à un village joliment perché sur la montagne mais plus moderne que les précédents, avec des maisons en ciment et des pylônes : la civilisation est proche. Nous sommes invités à prendre le thé chez Ibrahim, un vieil homme rencontré la veille dans les plantations. Da Brahim se laisse photographier de bonne grâce avec son petit-fils, adorable bonhomme de 3 ans, ou en train de verser le thé de manière experte. Notre hôte nous offre aussi le pain à l'huile d'olive et à la marmelade d'orange et, délice des délices, deux grands plateaux de cerises, les premières de la saison.
Un peu plus loin, les mules nous attendent pour le dernier pic-nique en pleine nature, non loin du village où les femmes, en costumes traditionnels, lavent le linge et les couvertures à la rivière.

Une partie de foot endiablée s'engage entre Jérôme, Camille, Dona, Régis et Cédric d'une part, et les deux Mohammed, Ibrahim et Laoussine d'autre part. Le moment est venu des adieux, cadeaux et remerciements : petites enveloppes d'argent pour les muletiers, le cuistot Ibrahim et notre guide Mohammed ; photos de groupe, sourires et mains tendues ; et Coralie, prof d'arts plastiques, dessine et offre quelques portraits.

Puis c'est le minibus tous ensemble et le retour vers Marrakech, en retraversant la vallée de l'Ourika dans l'autre sens. L'impression est radicalement différent de celle ressentie il y a 8 jours car c'est samedi et tous les marocains sont de sortie pour le week-end. Le havre de paix est devenu une sorte de petit Saint-Tropez de l'Atlas, avec des boutiques ouvertes tout le long de la route et des terrasses de restaurant qui regorgent de touristes locaux et étrangers sirotant un jus. Quelques hommes et enfants se baignent dans la rivière pendant que les femmes, souvent voilées, se prélassent à l'ombre.

De retour à Marrakech, je me précipite sur mon téléphone pour appeler mes parents et suis à la fois heureuse et soulagée d'entendre les petites voix flûtées de mes filles, visiblement en pleine forme.
Puis on se précipite au Jardin de Majorelle, incontournable visite recommandée par tous les guides. Et en effet, Majorelle pourrait être un paradis sur terre... s'il n'y avait, hélas, autant de touristes. L'endroit est frais, vert, exotique, ombragé avec une belle bâtisse bleue indigo, une treille et des fenêtres jaune vif. Cactus, babous, palmiers, fleurs tropicales, jet d'eau, on ne commence à apprécier que lorsque les hordes d'envahisseurs en short commencent à déserter les lieux.

Pendant que Cédric et Régis font l'expérience rustique du hammam marocain, je pique une tête dans la piscine et redécouvre avec délice, sous la douche, les bienfaits de la civilisation et de l'eau courante.
Dernière étape du voyage : les souks de la Médina, où l'on achète des babouches pour les filles et pour moi, des pâtisseries arabes et des verres à thé, tout cela en un temps record compte-tenu de l'indispensable marchandage destiné à flatter la susceptibilité des vendeurs marocains. Après dîner, on parcourt une dernière fois la place Jamaa El Fna dans une atmosphère qui rappelle les marchés de nuit Pékinois, grouillante, fumante, bruyante, en un mot terriblement exotique.
Nous quittons à regret ce tumulte de mouvement, de poussière et d'enfants.

Demain, dans quelques heures, nous aurons retrouvé nos filles.

2 commentaires:

BobeNoll a dit…

et bien on attend avec impatience les péripéties des parents
bon courage a laetice et grosses biz a vs 4

Seriousguide a dit…

Bonjour,

Je me présente : Grégoire ; je travaille pour Seriousguide, une nouvelle collection de guides de voyage.

Le principe : Seriousguide s'appuie sur des récits de voyage publiés sur notre plateforme http://www.seriousguide.fr comme première source d'information pour la sélection des contenus des guides de voyage imprimés.

Nous sommes en pleine période de lancement et les premières destinations que nous traitons sont l'Andalousie et le Maroc. Notre plateforme participative vient d'être ouverte au public et les voyages qui y sont publiés par les internautes représentent une source essentielle pour nos guides papiers. Toutefois, nous repérons également les contenus intéressants provenant d'autres blogs. C'est ainsi que nous avons pré-sélectionné le Riad Mabrouka dont vous parlez avec enthousiasme sur votre blog. Nous avons envoyé un de nos correspondants sur place pour le tester. Vous pouvez retrouver le récit qu'en fait Philippe sur (http://www.seriousguide.fr/voyages/marrakech-194/)

Si nous décidons de conserver cette activité pour notre guide Maroc, nous aimerions pouvoir vous citer comme étant notre source d'information.

Je tiens à vous préciser qu'en aucun cas nous n'allons reprendre votre récit, nous souhaitons uniquement pouvoir vous citer comme une de nos sources.
Pouvez-vous me donner votre accord par mail à l'adresse suivante : webmaster@seriousguide.fr

Cordialement,
Grégoire pour Seriousguide